Un procès pour viol fait la "une" des journaux
- faitestomberleviol
- 18 déc. 2015
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LES FAITS
Dans la nuit du 21 au 22 août 1974, Albert Mouglalis (28 ans), Guy Roger (33 ans) et Serge Petrilli (26 ans) décident, en sortant d'une boîte de nuit, d'aller "draguer" dans la calanque de Somiou, près du port de Moriguiou (Bouches du Rhône). Ils s'en prennent à deux touristes Belges, , Anne Tonglet, professeur de biologie (24 ans), et Aracelli Castellano (20 ans), puéricultrice, qui faisaient du camping. Elles refusent leurs avances et se défendent mais, à bout de forces, elles subissent un viol. Après le procès, près de quatre ans plus tard, des mouvements féministes d’extrême gauche, des syndicats et des partis de gauche manifestent leurs soutiens aux jeunes femmes. Le 3 mai 1978, les jurés de la cour d'assises des Bouches du Rhône condamnent les trois hommes qui reconnaissent l'absence de consentement tout en continuant à nier le viol, à des peines de prison, mais leur accordent des circonstances atténuantes. Gisèle Halimi, une des avocates des parties civiles, en tire la conclusion que "le drame du viol a connu ici une régression".
REPORTAGE
Six années de réclusion criminelle pour Serge Petrilli, quatre ans d’emprisonnement pour Albert Mouglalis et Guy Roger: c'est ce qu'ont décidé, mercredi 3 mai 1978, les jurés de la cour d'assises des Bouches du Rhône après une heure trente de délibérations. Serge Petrilli a été reconnu coupable de viol et ses deux amis coupables de tentatives de viol. La circonstance aggravante de viol en réunion n'a pas été retenue, tandis que les circonstances atténuantes ont été accordées aux trois accusés. Jean Perfetti, avocat général, avait requis "pas moins de sept années de réclusion criminelle pour Serge Petrilliu et six années pour les deux autres".
"Cette femme, la maman d'un des garçons, je la comprends", disait la mère d'Anne Tonglet en voyant Mme Mouglalis en larmes devant son fils qu'on arrêtait à l’audience. "Mais ont-ils fait ça et pourquoi dire que "mes" fils mentent?". Pourquoi surtout, pendant deux jours, a-t-on insisté pour continuer de faire des deux victimes des accusés,en encourageant ainsi le climat de tension et d'agression qui se développaient aux abords du palais ? "Une telle atmosphère de haine et d'agressivité est intolérable", faisait remarquer le professeur Alexandre Minkowski qui venait de témoigner pour Anne et Arecelli. "Ces femmes, avait-il dit, parlent de leur expérience de cette nuit là, comme je peux parler des tortures subies pendant la Résistance. Comme en moi, quelque chose en elles a été brisé pour la vie". La mère d'Anne, elle aussi devait raconter , le plus calmement possible en dépit de son émotion, comment elle était arrivée peu après les faits, appelée par sa filles aînée, comment elle avait vu "ses" filles à l’hôpital "comme des petites bêtes épouvantées ... Je les reconnaissais à peine." La dignité de cette femme, qui n'était pas venue crier vengeance, mais pour qu'on reconnaisse à sa fille le droit à son identité, n'a pas empêché les insultes à son égard et contre "toutes ces gouines, putains et mal baisées qui viennent se plaindre d'être violées". Par deux fois, Maître Gisèle Halimi a été bousculée. Elle et une autre jeune femme ont reçu des coups de poing; on a craché au visage, d'une femme, menacé par les journalistes. Les avocats de la défense se sont plaints eux aussi d'avoir été bousculés et traités de "machos, défenseurs de violeurs".
PSYCHODRAME SOCIAL
La salle d'audience n'a pas échappé à ces passions, devenant le lieu d'une espèce de psychodrame social. La défense a voulu faire de ce procès l'affrontement de Paris et du territoire avec "les avocats descendus de Paris pour nous donner des leçons", celui des "notables du seizième, témoins de la partie civile, contre les pêcheurs de Morigiou, témoins de la défense", et sans le dire, celui des femmes contre les hommes. "Messieurs les jurés, dira Maître Gilbert Collard, la solitude a changé de camp. Les femmes, autrefois, étaient seules devant la justice, leur parole n'était pas reconnue; aujourd'hui, ceux sont des hommes qui sont seuls devant vous." La solitude, peut-être, avait "changé de camp", mais pas le mépris. On essayait de faire juger deux femmes pour les choix de leur vie : lesbiennes, naturistes "libérées". Ces femmes disaient avoir subi "le saccage, l’anéantissement "; un psychiatre venait décrire "leur état de choc ", "l'atteinte à leur psychisme", "leur inaptitude à retrouver la joie". Après la répression sociale; Anne, enseignante, a été mutée dans un autre établissement scolaire lorsqu'on a appris l'affaire, on demandait encore contre elle la réprobation sociale.
"Le drame du viol a connu ici une régression, explique Maître Halimi. Un certain nombre de femmes ont été exagérément optimistes. On pensait cette question au moins réglée: le viol était un crime. Il y avait donc pour nous une nécessité de déplacer le problème, de poser la question de la pression et de construire l'avenir. Nous n'avons pas pu nous faire entendre et élever le débat. "
Régression aussi "sur ce que les femmes ont subi lorsqu'elles déposaient plaintes et que nous croyions qu'elles ne subiraient plus "c'est vous, vous l'avez cherché, sinon provoqué ou alors mal vécu". Régression enfin de ramener encore le débat à la thèse du « consentement ». »Comment une femme qui ne veut pas être violée doit-elle le dire à son violeur potentiel ? La résistance initiale de ces jeunes femmes n'a été contestée par personne. Si par peur de mourir, les femmes cèdent, est-ce cela qu'on appelle le consentement ? »
//extrait, Le Monde, Les femmes du droit de vote à la parité, Le drame du viol a connu ici une régression de Josyane Savigneau .
Remarque :
Cette affaire nous montre une régression de la perception du crime qu'est le viol par la société.
En effet, la société ne les considère pas comme victimes mais comme coupables à cause de leur orientation sexuelle. Cette affaire relate non seulement le dénit du viol par la société mais également de l'homophobie. La justice est influencée par la société et juge ainsi seul un des agresseurs coupable de l'acte alors que les deux autres ont été condamnés seulement pour " tentative " de viol. Les peines requises ont été aténuées et au final sont infimes. Tout cela fait que les agresseurs ne se reconaissent pas en tant que coupables mais qu'ils sont victimes de diffamations, que leurs actes n'étaient pas criminels. Au contraire des victimes qui elles ont vu leur culpabilité amassé suite à l'opinion public.
Cette affaire a révolté certaines femmes et a créé un déclic chez les féministes. Le viol est un combat pour lequel on doit se battre, notamment sur la question comment dire non ( voir parti consacré aux féministes ).
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